
Libba Bray, Belles dans la Jungle : Manuel de survie à l’usage des miss en milieu hostile, éd. Gallimard Jeunesse, février 2013.
(Titre original : Beauty Queens)
« Ce livre commence par un accident d’avion, mais ne vous en faites pas pour ça. Selon le ministère américain des Statistiques inutiles, la probabilité de mourir dans un accident d’avion est d’une sur un demi-million. Alors que celle de se faire arracher son bas de maillot par une grosse vague est de deux sur une. Par conséquent et tout bien considéré, il est plus sûr de prendre l’avion que d’aller à la plage. Comme nous le disions en ouverture, ce livre commence par un accident d’avion, mais il y a des survivantes. Vous voyez ? Ça s’arrange déjà. Ces survivantes sont des miss. » [p. 9]
« – J’ai repensé au livre dans lequel des garçons se retrouvent sur une île après que leur avion s’est écrasé, dit un jour Mary Lou à Adina tandis qu’elles se partageaient une papaye, appuyées sur les coudes dans le sable.
– Sa Majesté des mouches ? Et alors ?
– Tu dis qu’il ne donne pas la véritable mesure de l’humanité parce qu’il n’y a pas de filles dedans. Je me suis demandée si l’histoire aurait été différente avec des filles.
– Et ?
Mary Lou s’essuya la bouche du dos de la main.
– Possible que les filles aient besoin d’une île pour se trouver. D’un endroit où personne ne les surveille pour être ce qu’elles sont vraiment. » [p.208]
« Or donc, notre histoire commence par un plongeon brutal du haut du ciel au milieu des cris et des prières, tandis que l’équipe caméra, n’écoutant que son courage, ne perd pas une miette de l’agitation et du drame : quelle chance pour l’émission ! Les producteurs vont êtres dingues ! L’Audimat va exploser. Soudain, quelques rares hôtesses se précipitent dans les allées en hurlant des ordres et en vérifiant les fermetures des casiers à bagages, qui vibrent au-dessus des têtes. Une des jeunes filles entraîne les autres à chanter un hymne qui s’intitule Jésus est mon copilote. Les voilà rassurées. Comme si elles ne doutaient pas un instant qu’un barbu drapé de blanc et portant des sandales soit en train d’enfiler un casque et de prendre les commandes de l’avion. » [p. 11]
« Etre seule ne lui faisait pas peur. Seule, elle l’était depuis qu’elle avait dix ans, époque où elle suppliait sa mère de ne plus l’envoyer chez mamie Huberman, la bigote, qui lui serinait que Dieu était capable de voir dans son cœur déviant. A l’appui de ses dires, elle agitait Basket féminin magazine qu’elle avait trouvé sous le lit de Jennifer, le numéro dans lequel celle-ci avait entouré d’un cœur la photo de Monica Mathers, la célèbre meneuse de jeu.
– Dieu n’aime pas les lesbiennes, avait craché mamie Huberman en jetant le magazine à la poubelle.
Jennifer connaissait le sens du mot « lesbienne » et se doutait qu’elle en était une. Mais elle ne comprenait pas pourquoi Dieu lui en aurait tenu rigueur ainsi qu’à Monica Mathers, qui n’avait jamais déclenché de guerre ni tué quiconque et dont les paniers à trois points étaient époustouflants. Après tout, Dieu ne les avait-Il pas créées toutes les deux ? Mais Jennifer avait remarqué que les gens étaient comme ça. Ils invoquaient le divin dans les circonstances les plus étranges et pour les raisons les plus stupides. » [p. 76-77]
« Jennifer retira d’un coup sec la serviette hygiénique maxi qui servait de bâillon à Harris.
– Aïe ! Ça fait mal ! brailla Harris.
Jennifer ne fut pas impressionnée.
– Tu veux savoir ce que c’est d’avoir vraiment mal ? Essaye de tomber en panne de paracétamol quand tu as des règles de force cinq. J’ai eu des crampes pour lesquelles un homme adulte aurait supplié qu’on lui mette une balle entre les deux yeux. » [p. 361]
Ma note :
