Sauveur & Fils (saison 1), de Marie-Aude Murail

Marie-Aude Murail, Sauveur & Fils (saison 1), éd. École des Loisirs (poche), mai 2018

Sauveur Saint-Yves élève seul son fils Lazare dans un petit pavillon d’Orléans. D’origine Martiniquaise, il s’est installé en métropole à la mort de sa femme et exerce en tant que psychologue clinicien dans son cabinet qui jouxte son domicile. Tenter d’éduquer au mieux son fils métisse et prendre soin de ses patients aux pathologies multiples n’est pas chose aisée.

 

En bref :

Sauveur Saint-Yves est psychologue clinicien. Il exerce au sein de son cabinet qu’il a installé dans une partie séparée de son domicile. Chaque jour, il tente du mieux qu’il peut d’aider ses patients à aller mieux.

Leurs troubles sont multiples et leurs profils sont variés : la lycéenne dont les parents se sont séparés et qui ne souhaite plus vivre avec sa mère, la collégienne qui appréhende avec difficulté sa puberté et est en pleine recherche d’identité, le jeune garçon qui fait pipi au lit malgré ses 7 ans parce que sa maman voit un nouvel ami…

Le propre fils de Sauveur, Lazare, se pose lui aussi des questions : Qui est-il vraiment ? Sa maman était-elle vraiment blanche ? Pourquoi les gens le regardent-ils parfois différemment ? Son papa acceptera-t-il d’adopter un petit hamster ?

Et quels sont ces mystérieux paquets déposés devant leur domicile, et qui semblent rappeler de mauvais souvenirs tout droit venus de la Martinique à son papa ?

 

Instagram @missmymoo

 

Mon avis :

Cela faisait un moment que je voyais cette série de romans aux couvertures atypiques et que je me posais la question : « Mais de quoi peuvent-ils bien parler ? ».

Depuis que je travaille en librairie, j’ai constaté qu’ils sont très fréquemment demandés par les lecteurs, ce qui n’a fait que renforcer mon intérêt pour cette saga !

Mais pourquoi y a-t-il donc un cochon d’Inde sur la couverture ?!

J’ai enfin trouvé les réponses à toutes ses questions en lisant le premier tome de Sauveurs & Fils, un magnifique roman signé Marie-Aude Murail.

Je n’avais encore jamais rien lu de cette auteure (ne me lynchez pas, je comprends désormais mon erreur), et j’ai été très agréablement surprise : par la beauté de sa plume, les sujets très importants qu’elle aborde, mais également la justesse des mots qu’elle emploie par rapport à des situations parfois très complexes.

Vous l’aurez compris au résumé que je vous en ai fait plus haut, il est principalement question dans ce roman de troubles psychologiques, d’épanouissement personnel, mais aussi de racisme.

J’ai été très marquée par certaines réflexions auxquelles nous invite Marie-Aude Murail au fil des pages, notamment grâce à certains passages qui illustrent des idées auxquelles j’adhère totalement.

Au sujet de la compréhension de certains troubles mentaux aujourd’hui en France, de la situation en comparaison avec les pays anglo-saxons :

« L’article concluait que la France, en retard dans ce débat, n’offrait pas d’autre option à ces enfants qu’une inefficace psychothérapie. » (p. 52-53)

À la question de la recherche d’identité chez une fille qui se sent plutôt garçon :

« – On vit tous avec un double, qui est nous dans un autre monde. C’est pour ça qu’on lit, qu’on joue aux jeux vidéo, qu’on s’identifie à des personnages, qu’on part sur internet dans des univers virtuels. Tu as un royaume à toi, Ella, où tu es le prince Elliot. » (p. 48)

De même, la situation des jeunes sur-diplômés en recherche perpétuelle d’emploi et en situation précaire bien plus tard au fil des ans :

« – J’ai fait un stage. Ça fait quatre ans que je fais des stages. À 300 euros par mois pour dix heures de taf par jour. J’ai 28 ans. J’ai un Master de communication. Ça veut dire bac + 5. […] On fait semblant d’avoir un travail, on dit aux gens : « Je travaille chez Veolia » ou : « Je bosse pour une grosse agence de pub. » Et c’est vrai qu’on travaille comme si on était des cadres, peut-être même qu’on travaille plus, plus tard le soir, plus dur, parce qu’on espère être embauchée… à la fin du stage. Mais au bout de trois mois, on nous jette comme un Kleenex, on nous remplace par un autre stagiaire. À 300 euros. » (p. 223-224)

Je peux vous garantir que cette précédente citation m’a tout particulièrement remuée, ayant (et je suis loin d’être la seule) vécu la même chose et en subissant toujours les conséquences injustes de cette situation…

La question du racisme est également bien présente, et notamment au travers des yeux d’un petit garçon de 7 ans qui ne comprend pas très bien les remarques des adultes, et même parfois de certains enfants répétant ce qu’ils entendent de la bouche de leurs aînés. Et il est encore plus poignant de constater la façon pernicieuse dont des pensées haineuses peuvent s’insinuer dans des esprits qui n’auraient jamais pensé à exclure, discriminer, rejeter.

J’aimerais conclure sur une dernière citation, que j’ai trouvée particulièrement inspirante. Le message de Sauveur à son fils, son envie d’aider son prochain, mais la conscience que chaque chose à ses limites, et qu’on ne peut véritablement sauver une personne que si celle-ci choisit d’attraper la main qu’on lui tend.

« Parce qu’on ne sauve pas les gens d’eux-mêmes, Lazare. On peut les aimer, les accompagner, les encourager, les soutenir. Mais chacun se sauve soi-même, s’il le veut, s’il le peut. Tu peux aider les autres, Lazare. Mais tu n’es pas tout-puissant. » (p. 367)

Si vous êtes comme moi, que vous avez toujours été intrigué(e) par ces romans avec un cochon d’Inde (au lieu d’un hamster) en couverture : foncez lire Sauveur & Fils sans y regarder à deux fois, vous aller découvrir une petite pépite signée de la plume d’une brillante auteure française.

En ce qui me concerne, je ne manquerai pas de lire la suite !

Ma note :

 

Merci aux éditions L’École des Loisirs pour m’avoir proposé de lire ce roman.

 

(2) Comments

  1. Félicitations pour ton travail en librairie !
    Je n’ai jamais lu cette saga mais je pense que je le ferais un jour =)

    1. Merci beaucoup !
      Oui je te la conseille vraiment, elle est top 🙂

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